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L'économie circulaire dans l'agro-alimentaire: quel avenir en Belgique au-delà des success stories?

Le thème de l’économie circulaire envahit de plus en plus l’espace public et le débat sociétal, s’appuyant sur de nombreuses "histoires à succès". Cette présence massive contraste avec le peu de recherches académiques en la matière, particulièrement dans le domaine agro-alimentaire. Philippine de Radiguès a questionné la durabilité et la réplicabilité des chaînes de production circulaire de ce secteur en Belgique. Sur la base d’une vingtaine de rencontres avec des acteurs très variés, représentant des entreprises de taille, nature et histoire très diverses, elle a identifié les principales opportunités et limites à l’expansion de l’économie circulaire. Parmi ces limites, la récurrence d’obstacles techniques, le flou juridique et réglementaire frappant les notions de "déchets" et de "coproduits" et la difficulté de s’étendre au-delà des marchés de niche. Ces difficultés frappent davantage les initiatives récentes, innovant dans de nouveaux produits et secteurs, que les entreprises qui pratiquent de longue date des formes d’économie circulaire sans être nécessairement identifiées comme telles.

La protection de la ressource "eau" en Europe: une source d'inspiration pour la création d'un droit de l'homme à l'alimentation saine.

Le travail de Saba Parsa part de deux constats. Primo, les aliments transformés représentent près de 75 % des ventes alimentaires dans le monde et participent lourdement aux maladies non-transmissibles (obésité, diabète, hypertension, etc.). Secundo, la Cour européenne des Droits de l’homme ne reconnaît pas le droit à l’alimentation ni – a fortiori – le droit à l’alimentation saine. Saba Parsa a donc tenté d’établir la justiciabilité du droit à l’alimentation saine devant la juridiction strasbourgeoise en s’inspirant de sa jurisprudence relative au droit à l’eau. Situé à l’articulation du droit de l’environnement et du droit à la santé et porté par une logique « droit de l’hommiste », son travail fait écho à la popularité croissante de la notion de souveraineté alimentaire dans la société civile. En établissant les bases de la juridicité du droit à l’alimentation saine, sa recherche contribue également à questionner la responsabilité des États en la matière, tout en responsabilisant les multinationales du secteur agro-alimentaire.

La Cuisine des Champs est issue d’une dizaine d'années d’expérience d’une ancienne version de l’entreprise (TCO Services) dans laquelle la réflexion sur la qualité de l’alimentation dans les collectivités a grandi et abouti à la création d’un nouveau projet.

En 2005, TCO a démarré un projet d’alimentation saine et durable dans plusieurs écoles. D’autres écoles ont souhaité bénéficier des repas de l’entreprise. Cette demande a confirmé que le projet répondait à un besoin réel du public de bénéficier d’une alternative aux repas de cantines scolaires que beaucoup considèrent comme de la malbouffe.
 
Le projet consistait à préparer des repas avec des produits et des matières premières simples, de bien les travailler et de faire des bons repas de collectivité à des coûts démocratiques.
Le projet a démarré en mettant l’accent sur l’alimentation saine, ensuite bio et durable pour aboutir à une démarche globale d’alimentation durable.

Pour concrétiser ce parcours, il a fallu travailler de façon transversale en donnant la priorité à l’aspect qualitatif et bio mais aussi à l’aspect environnemental, social et économique. Le plus grand frein du projet était de trouver des solutions d‘approvisionnement en circuits courts et de rencontrer des producteurs ou des filières répondant aux besoins d’une cuisine de collectivité. Des filières existent, certes, mais elles lient les producteurs locaux et les paniers bios ou des magasins mais aucune filière ne répond aux besoins spécifiques des collectivités.

C’est sur ce manque qu’est née l’idée de construire une cuisine réellement au milieu des champs, intégrant la capacité de se rapprocher des fournisseurs et d’intégrer la dimension « légumerie » dans laquelle on travaille le produit brut.

Un autre aspect du projet était de répondre aux besoins spécifiques en repas de qualité pour des crèches.

La cuisine a été construite à Fernelmont, au milieu des champs mais dans un zoning positionné stratégiquement au cœur de la Wallonie et répondant aux besoins pratiques d’une entreprise avec ses livraisons et ses va-et-vient de fournisseurs. Aujourd’hui encore, le challenge reste de trouver des producteurs, quitte à ce que le projet développe lui-même ses filières d’approvisionnement en circuits-courts.

La Cuisine des Champs permet aux producteurs de vendre des produits qu’ils ne peuvent pas écouler dans les filières classiques tels que des légumes hors-calibres, les invendus ou des surplus de production comme cela arrive inévitablement quand, par exemple, toutes les tomates sont mûres en même temps. La Cuisine des Champs peut alors les transformer en coulis pour anticiper la préparation de menus.

Voilà l’idée de la Cuisine des Champs : travailler des produits de producteurs locaux en utilisant des filières courtes pour fournir des repas de qualité aux collectivités.

« Les Compagnons de la Terre » est une coopérative citoyenne et paysanne, émanant de la Ceinture Aliment-Terre liégeoise, qui regroupe plus de 300 coopérateurs dans une perspective de souveraineté alimentaire par la construction de filières courtes d’approvisionnement. Le projet favorise l’émergence de petits producteurs écologiques issus ou non du monde agricole. Il soutient également la transition écologique des agriculteurs conventionnels.

En 2012, un acquéreur privé non issu du monde agricole achète une ferme bio de 50ha. Face à la difficulté de trouver des parcelles de cultures, des maraîchers indépendants et l’Agence de développement local de Comblain-au-Pont vont créer un partenariat local autour du porteur de projet privé pour maintenir un projet d’agriculture biologique sur le site.

Rapidement, d’autres producteurs indépendants et d’autres propriétaires terriens vont se joindre au projet de la coopérative. Cette agrégation va permettre de développer un modèle social d’organisation des producteurs et une réflexion poussée sur la gouvernance. Des centaines de personnes vont se mobiliser autour de la transformation en profondeur du système alimentaire liégeois et 42 fondateurs vont permettre d’investir un nouveau site de production agroécologique de 30 ha à Mortier.  

La coopérative n’est pas une coupole fédérant par le dessus les producteurs mais bien un trait-d‘union permettant de mutualiser les savoirs et les outils. Elle propose également des conventions aux producteurs indépendants et permet de créer une mutualisation des ressources.

Les Compagnons de la Terre est une coopérative financée en grande partie par l’épargne citoyenne. Les besoins en capitaux sont prioritairement orientés sur les investissements à réaliser comme l’achat de terres et de matériel ; cependant, l’équilibre permet de dégager des marges bénéficiaires couvrant largement les dépenses liées à l’exploitation.

Dans sa finalité sociale, l’association vise à créer une vingtaine d’emplois durables et autoportants pour des personnes issues des filières d’insertion socio-professionnelle. Elle entend également assurer la production de la majorité des besoins alimentaires d’un millier de familles liégeoises.

Les nouveaux systèmes de distribution alimentaire ne cessent d'émerger. Pour connaître leur impact en matière d'émissions de gaz à effet de serre (GES) et proposer d'éventuelles améliorations, Solène Sureau a appliqué une analyse de cycle de vie à deux systèmes en circuit court (les paniers bios d'une coopérative et les GASAP) en les comparant à la distribution en circuit long. Il en résulte que le stade de la production constitue la principale source d'émissions. Pour la distribution, le supermarché enregistre le meilleur résultat. Viennent ensuite les GASAP, le magasin bio et, enfin, la coopérative. Ces résultats soulignent que si l'on veut évaluer l'impact en termes d'émissions de GES, l'analyse des kilomètres parcourus doit être complétée par celle de la chaîne logistique dans son ensemble. L'auteure situe cette problématique dans le cadre plus large du gaspillage alimentaire, de la qualité des produits et de leur origine géographique.

Depuis quelques années, le rapprochement du producteur et du consommateur au sein des systèmes alimentaires connaît un succès grandissant. Cette évolution se manifeste notamment dans l'engouement pour les paniers alimentaires. C'est dans ce contexte que se situe le travail de Manuel Lambert. Celui-ci s'est attaché à définir un système de production agroécologique adapté à une exploitation agricole biologique de 83 hectares (le Domaine de Graux, à Tournai). L'originalité de son approche consiste à avoir défini un panier alimentaire "idéal"' d'un point de vue nutritionnel (pauvre en céréales raffinées, bien équilibré en acides/bases ainsi qu’en acides gras, …) et d'avoir également défini le panier alimentaire "classique" du consommateur belge. Il a ensuite dimensionné et modélisé la production nécessaire pour répondre à ces besoins, estimant notamment les surfaces nécessaires au sein de l'exploitation. L'outil mis au point permet l'accompagnement potentiel d'autres projets agroécologiques et paysans.